GLUCK (C. W. von)

GLUCK (C. W. von)
GLUCK (C. W. von)

Si Gluck est à ranger parmi les principaux compositeurs de la période «préclassique» (à côté de Baldassare Galuppi, Tommaso Traetta, Johann Christian Bach et Carl Philipp Emanuel Bach), c’est avant tout pour avoir proposé une nouvelle conception de l’opéra, d’abord dans le domaine italien (de 1762 à 1770), puis dans la tragédie lyrique française (de 1774 à 1779). La «réforme» gluckiste de l’opéra italien, dont les œuvres les plus représentatives sont Orfeo ed Euridice et Alceste , doit son importance tout autant à l’originalité d’un style musical énergique et grandiose qu’à ses liens directs avec l’esthétique des Lumières telle qu’elle s’est exprimée à Paris dans les années 1750, puis à Vienne, à la cour de l’impératrice Marie-Thérèse. Gluck termina sa longue carrière en accomplissant à l’Académie royale de musique de Paris une véritable révolution (le mot apparaît dans les écrits des contemporains), qui eut pour conséquences la disparition du répertoire lullo-ramiste et l’essor d’un nouveau style lyrique français dans les années 1780.

Toutes les œuvres majeures de Gluck sont le résultat d’une étroite collaboration avec ses librettistes – fait rare au XVIIIe siècle – et se caractérisent par la recherche d’une continuité musicale en coïncidence parfaite avec le rythme de l’action dramatique; chez Gluck, le primat de la pensée architecturale ne doit cependant pas masquer ses dons de mélodiste (en témoignent des airs restés célèbres, comme «Che farò senza Euridice» et «Ô malheureuse Iphigénie») ni la richesse de son écriture orchestrale, maintes fois citée en exemple par Berlioz dans son Grand Traité d’instrumentation et d’orchestration modernes .

Le compositeur italien (1741-1754)

On ne sait quasiment rien des études musicales de Gluck dans sa Bohême natale, mais on peut imaginer que ses séjours à Prague et à Vienne (entre 1728 et 1737) furent émaillés d’épisodes aussi pittoresques que ceux que rapporte Charles Burney dans ses vies de Johann Joachim Quantz et de František Benda. C’est à Milan qu’il paracheva sa formation de compositeur, au contact de Giovanni Battista Sammartini, et qu’il fit ses début au théâtre en mettant en musique l’un des plus célèbres livrets de Métastase, Artaserse (1741). Dans les dix ans qui suivirent, la carrière de Gluck ressemble à celle de bien d’autres compositeurs d’opéras italiens, avec une production moyenne d’un ou deux ouvrages nouveaux par saison. Outre la précieuse expérience qu’offrait au jeune musicien la possibilité d’écrire pour certains des plus grands chanteurs de son temps (les castrats Angelo Maria Monticelli et Caffarelli, la soprano Vittoria Tesi) et de se faire jouer devant les publics les plus variés, en Italie comme en Allemagne, Gluck eut par deux fois l’occasion d’élargir son horizon au-delà des limites de l’opera seria traditionnel: un long séjour à Londres (1745-1746) le mit en contact avec les oratorios de Haendel, mais lui permit aussi de découvrir, dans les ballad operas qui faisaient alors fureur, un style vocal simple et naturel dont il dira avoir été profondément marqué; il n’est pas indifférent non plus qu’il se soit trouvé à Copenhague en 1749, l’année même où Johann Adolph Scheibe exposait, dans la préface à son opéra Thusnelda , des idées annonciatrices de la future «réforme».

Les premiers opéras de Gluck, même s’ils sont aujourd’hui presque totalement oubliés, mériteraient d’être exhumés en morceaux choisis: c’est déjà ce qu’avait fait Gluck lui-même, puisqu’il pilla consciencieusement sa production de jeunesse, inconnue du public de Vienne et de Paris, pour en adapter les meilleurs morceaux à de nouveaux textes italiens, et même à des paroles françaises. Les plus réussis de ces emprunts sont l’air «Se povero il ruscello», tiré d’Ezio , qui devint le grand récitatif obligé «Che puro ciel» dans Orfeo , «Là sul margine di Lete», tiré de La Sofonisba , et «Presso l’onda», tiré de Il Tigrane , qui devinrent respectivement «Esprits de haine» et «Venez, Haine» dans Armide , et «Se mai senti spirarti sul volto», tiré de La Clemenza di Tito , dont Gluck fit l’air avec chœur «Ô malheureuse Iphigénie – Contemplez ces tristes apprêts» dans Iphigénie en Tauride . L’originalité du jeune Gluck apparaît surtout dans une curieuse prédilection pour les phrases de trois mesures, qui marquent déjà un intérêt particulier pour les périodes asymétriques; quant à l’appréciation de Métastase sur sa Semiramide riconosciuta (1748) – «une insupportable musique de vandale» –, elle fut sans doute inspirée par une surprenante variété dans la structure des airs, variété qui tranchait sur la routine des compositeurs officiels de la cour d’Autriche, comme Giuseppe Bonno ou Johann Georg Reutter.

Gluck au Burgtheater (1755-1770)

À la fin de 1752, Gluck s’installa dans la capitale autrichienne. Quelle que fût la nécessité de régénérer la musique dramatique dans la Vienne de Marie-Thérèse, c’est une raison politique qui en fit un haut lieu de l’opéra dans les années 1760. Un renversement des alliances favorable à la France fut en effet accompagné d’un changement d’orientation dans les spectacles de la ville, et le chancelier Kaunitz donna d’importantes responsabilités à un fin lettré, le comte Durazzo, Italien mais francophile, pour qu’il mît en œuvre cette nouvelle orientation esthétique. Durazzo fit du Burgtheater l’instrument privilégié de son entreprise, et Gluck se vit confier la responsabilité d’adapter au goût viennois des opéras-comiques directement importés de Paris; non content de fournir des «airs nouveaux» à la troupe française de son théâtre, Gluck composa huit opéras-comiques de son cru, dont le dernier, La Rencontre imprévue (1764), constitue l’antécédent direct de L’Enlèvement au sérail de Mozart. Il fallut cependant attendre l’arrivée du poète et financier Raniero de Calzabigi, en 1761, pour que Durazzo trouve un librettiste à la hauteur de ses ambitions. Calzabigi était doublement qualifié pour cela, puisque non seulement il résidait à Paris au moment de la querelle des Bouffons (1752-1754), mais il connaissait mieux que personne les livrets de Métastase, dont il avait dirigé et préfacé l’édition parisienne de 1755. Le premier fruit de sa collaboration avec Gluck sera le ballet Don Juan, ou le Festin de pierre (1761), auquel succéderont trois grands opéras de la réforme viennoise, Orfeo ed Euridice (1762), Alceste (1767) et Paride ed Elena (1770).

C’est à Calzabigi que revient la paternité de la célèbre préface d’Alceste , publiée en 1769, où sont exposés les principaux griefs du clan réformateur contre le dramma per musica de type métastasien: il fallait en finir avec les longues ritournelles orchestrales, les roulades vides de sens, la monotonie mécanique de la reprise da capo , le hiatus entre l’air et le récitatif, en un mot tout ce qui pouvait entraver la continuité de l’action dramatique. L’exigence d’une véritable symbiose de la musique et du texte se traduit par l’élaboration de grandes architectures tonales, à l’échelle de plusieurs scènes, l’intervention régulière du chœur et de la danse, enfin la subordination de tous les effets musicaux à un même dessein unificateur, toutes caractéristiques qui font des trois opéras de Calzabigi le parfait équivalent du courant néo-classique alors dominant dans le domaine des arts visuels. Le hiératisme et la force édifiante qui se dégagent de ces œuvres ne doivent cependant pas faire oublier qu’elles frappèrent les spectateurs du temps par la violence de leur charge expressive: la monumentalité des grandes scènes de lamentation n’exclut pas une extrême ductilité du discours musical, pour aboutir même à la fragmentation des «affects» qui conditionnaient jusqu’alors la rhétorique baroque. Là où Métastase et les compositeurs des années 1720-1760 s’en tenaient à une succession rigide d’airs indépendants, exprimant chacun un sentiment bien défini (la fureur, la tendresse, l’affliction, l’espérance, etc.), Gluck et Calzabigi instaurent une dialectique contrastée, où se succèdent sans solution de continuité des airs, des récitatifs et des chœurs, la subversion des schémas habituels allant jusqu’à l’éclatement de certains airs – «Io non chiedo» d’Alceste , par exemple – en plusieurs sections distinctes par leur tempo, leur profil thématique et leur texture orchestrale.

La postérité de la réforme gluckiste dans l’opéra italien du XVIIIe siècle finissant ne fut pas à la mesure de l’attention que suscitèrent Orfeo et Alceste auprès des théoriciens de l’opéra: non seulement l’ambition novatrice était plutôt rare parmi les compositeurs italiens (seul Mozart, dans Idomeneo , s’engagea résolument sur la voie tracée par Alceste ), mais le système productif du dramma per musica , fondé sur la suprématie du chanteur, excluait par nature toute poursuite des expériences menées dans le «laboratoire» du Burgtheater.

La réforme parisienne (1774-1779)

C’est à Paris que Gluck alla parachever son œuvre réformatrice, profitant à la fois de la déliquescence du répertoire français à l’Académie royale de musique et de la protection de la jeune dauphine, puis reine, Marie-Antoinette. Ce transfert de Vienne à Paris se justifiait d’autant plus que les opéras calzabigiens s’inspiraient étroitement de schémas formels hérités de Lully et de Rameau, et que le public parisien, nourri des textes prémonitoires de Rousseau, de d’Alembert et de Diderot, attendait avidement une musique qui fût à la fois passionnée, spectaculaire et dénuée d’artifice.

Iphigénie en Aulide (1774) trahit un certain embarras devant les contraintes mélodiques engendrées par la langue française, mais on n’y trouve pas moins de gigantesques monologues (pour Agamemnon et pour Clytemnestre) où s’effectue à la perfection cette adéquation tant recherchée entre l’expression musicale et le «cri plaintif de la nature». Vinrent ensuite deux adaptations des chefs-d’œuvre viennois, Orphée et Eurydice (1774) et Alceste (1776); si Orphée perd en cohérence ce qu’il gagne en longueur, l’Alceste française, profondément remaniée par rapport à la version originale, réalise un progrès décisif dans l’ordre de la concision et de l’efficacité dramatique.

Il pourrait paraître curieux que Gluck, salué avec enthousiasme comme le rénovateur du théâtre lyrique français, se soit tourné, pour sa quatrième tragédie lyrique, vers un livret de Quinault déjà mis en musique par Lully presque un siècle plus tôt; l’archaïsme d’Armide (1777) était cependant plus apparent que réel: dans le contexte européen où se situait Gluck, le passage incessant de l’air au récitatif et la multiplication des «petits airs» étaient autant d’éléments progressistes, tandis que le respect scrupuleux d’un texte sacré du vieux répertoire donnait des gages solides aux gardiens du style national français. C’est dans ce contexte qu’il faudrait évoquer une féroce guerre de pamphlets qui opposa trois années durant un clan pro-français – les gluckistes – et un clan pro-italien rallié autour du compositeur italien Niccolò Piccinni, dont le Roland fut chaleureusement accueilli en janvier 1778; mais la théorisation des styles proposée par des écrivains comme Marmontel (le plus ardent piccinniste) ou l’abbé Arnaud (à la tête des gluckistes) ne rend compte que partiellement des enjeux dramatiques et musicaux tels que nous pouvons les percevoir avec le recul de l’histoire.

Iphigénie en Tauride (1779) manifeste chez Gluck une évidente volonté de synthèse, si l’on considère (fait ignoré des spectateurs parisiens) qu’un tiers de la musique en est repris de ses ouvrages antérieurs; le plus spectaculaire de ces emprunts est l’air «Ô malheureuse Iphigénie», dont le lyrisme gagne encore en grandeur à être situé au faîte d’une longue progression dramatique où se succèdent sans pause conclusive les hallucinations d’Oreste, le chœur des Euménides, le long récitatif entre Oreste et sa sœur, et un chœur de prêtresses. La possibilité d’une comparaison avec l’Iphigénie en Tauride de Piccinni, créée à Paris en 1781, fait apparaître chez Gluck et son librettiste Nicolas François Guillard une double supériorité, au-delà d’une semblable adhésion aux canons de la tragédie lyrique; d’un point de vue dramaturgique, tout d’abord, le découpage de l’action révèle une plus grande maîtrise de la distribution des épisodes: il est significatif, par exemple, que Guillard ait placé le songe d’Iphigénie avant, et non après l’évocation de la tempête, ce qui résout le problème de l’ouverture tout en imprimant à l’action un élan qui ne retombe qu’avec le premier air d’Iphigénie, «Ô toi qui prolongeas mes jours». Mais c’est plus encore sur le terrain proprement musical que Gluck marque ses points décisifs: il n’est qu’à voir la subtilité avec laquelle est rendu, par des moyens mélodiques et structurels, le contraste entre l’angoisse d’Oreste («Dieux qui me poursuivez») et la sérénité apaisante de Pylade dans l’air qui suit, «Unis dès la plus tendre enfance».

La carrière parisienne de Gluck s’acheva sur l’échec d’Écho et Narcisse (1779); le compositeur refusa ensuite toute collaboration avec un milieu musical et intellectuel dont il avait une piètre opinion. Il aurait sans doute souhaité contribuer à la fondation d’un opéra national en langue allemande, comme le laisse entendre sa correspondance avec Herder, Klopstock et Wieland, mais sa santé déclinante lui interdit de se lancer dans de nouvelles entreprises de longue haleine. Sa dernière production pour le théâtre est une version allemande d’Iphigénie en Tauride , dont la représentation en 1781, devant le grand-duc Paul de Russie, conjointement avec Orfeo et Alceste , témoigne du prestige dont jouissait le vieux compositeur l’année même où Mozart partait à la conquête de Vienne.

«Une belle simplicité»

La relative incompréhension dont Gluck est victime aujourd’hui vient en partie de ce que l’essentiel de son apport à l’histoire de l’opéra est d’ordre architectural: or il faut bien reconnaître que le spectateur moderne, habitué aux finales mozartiens et à la continuité wagnérienne, n’éprouve aucune admiration ni surprise particulière devant de grandes scènes d’action comme la confrontation entre Orphée et les Furies, ou la succession haletante d’événements sur laquelle se termine Iphigénie en Tauride . De même, la «belle simplicité» postulée par Calzabigi dans sa préface d’Alceste laisse parfois une certaine impression de fadeur, alors même que les contemporains y voyaient la mise à nu des émotions essentielles de l’âme humaine, la traduction musicale authentique des modèles euripidiens. La réhabilitation de Gluck passera sans doute par la redécouverte d’un style d’interprétation vigoureux et coloré, en particulier dans les récitatifs: à cet égard, il faut signaler que Calzabigi avait réclamé pour ses opéras viennois des chanteurs formés à l’opéra bouffe, et que Gluck apportait un soin maniaque aux représentations de ses tragédies lyriques parisiennes. Mais l’originalité de Gluck est tout autant à chercher dans les détails de son écriture musicale: c’est à Berlioz et à Donald Tovey, en particulier, que revient le mérite d’avoir attiré l’attention sur la diversité des carrures métriques dans des airs comme «Divinités du Styx» (Alceste , acte I, scène VII) ou «Peuvent-ils ordonner qu’un père» (Iphigénie en Aulide , acte I, scène III), révélant un contrôle souverain du débit dramatique et du temps musical. Analysé d’aussi près, Gluck apparaît paradoxalement comme un maître de l’irrégularité et du déséquilibre dynamique – preuve que le néo-classicisme des Lumières n’était pas si austère et si solennel qu’on veut bien le croire.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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